Indépendant et multi-actif

“Mon grand-père a fait le même travail toute sa vie, mon père a eu 7 emplois différents tout au long de sa carrière, et moi j’ai 7 emplois en même temps”.  Seth Godin

Le terme « slasheur »  vient du signe typographique « slash » ou  « / » qui sépare des  éléments simultanés. Il représente aujourd’hui un profil de travailleur indépendant qui organise sa vie au travers d’une multi-activité professionnelle en relation avec une ou plusieurs passions.

Le slasheur peut donc être  salarié/entrepreneur, graphiste/cuisinier ou bien encore juriste/paysagiste… Les combinaisons sont aussi variées que leurs passions !

L’exemple des slasheurs est un signe de l’évolution de la relation à l’Emploi, dont parle si bien Emmanuelle Duez (Fondatrice de The Boson Project) sous l’angle des générations Y ou Z.

entreprise

Le sujet a un intérêt certain : il illustre  la difficulté à catégoriser les nouveaux travailleurs, comme les slasheurs qui forment un sous-ensemble non négligeable des 4,5 millions d’actifs (16% de la population active) qui en France ont pour caractéristiques de multiplier les activités rémunérées.

Dans tous les cas, ils se distinguent par leur volonté de concilier des impératifs financiers (gagner sa vie) et personnels (s’épanouir en général).

L’origine du phénomène : l’essor du travail indépendant

Les États-Unis comptent 53 millions de travailleurs en freelance. Ces derniers pèsent  près de 35 % de la force de travail américaine, avec une nette tendance à la hausse. Ce phénomène entraine l’émergence d’entrepreneurs en solo, d’infopreneurs (sur internet), de contractuels, de travail entre particuliers et de professionnels de la multi activité comme les slasheurs.

Pour Vivian Giang, une spécialiste qui étudie cette évolution du travail indépendant, cela ne signifie pas une plus grande précarité. Au contraire, en se fondant sur une étude récente Vision for the economy of 2040 (1)  elle annonce même que dans « la prochaine économie », le travail sera sans doute plus « lucratif et épanouissant ».

En France, le phénomène des slasheurs se développe depuis 2010. Il est au départ corrélé avec l’augmentation des contrats en CDD (2), le rejet par certains jeunes des CDI (parfois mal payés et dans un cadre hiérarchique jugé trop pesant), les situations de reconversion après une période de chômage ou de difficultés professionnelles (burn out, bore out, conditions de travail difficiles).

La particularité des slasheurs est qu’ils visent à réinventer leur projet de vie au prix de certains sacrifices (perte d’un confort financier ou d’une position sociale) .

travailleurs

S’accomplir  plus que réussir ?

Le but du slasheur est de trouver un équilibre financier et personnel, travailler pour ne pas être dans la précarité tout en accomplissant une tâche dans laquelle il s’épanouit. Dans ce sens, il va plus loin que le fait d’être multi-actif : il cherche à vivre de ses talents et de ses passions en imaginant des combinaisons d’activités.

Bien sûr, tout n’est pas si simple. Souvent le slasheur additionne un emploi alimentaire avec une autre activité moins rémunératrice mais plus stimulante. D’autres multiplient les activités autour d’une compétence et d’une passion afin de s’assurer des revenus réguliers.

Selon les slasheurs qui réussissent à atteindre leur équilibre, l’important est de garder en tête son objectif et suivre un fil rouge. Cela passe démarre parfois par un bilan de compétence poussé et un travail sur soi. Au final, l’essentiel est de trouver dans une cohérence générale les ressorts de sa motivation profonde, la source d’implication dans ses futures activités.

Prise de conscience politique pour sécuriser le parcours des indépendants ?

Le sujet de la sécurisation des nouvelles formes d’emplois  est abordé par la plupart des candidats à l’élection présidentielle. Même si peu de décideurs politiques connaissent le terme de shlasheur, la plupart des projets tiennent compte du risque de précarité liées aux missions répétées -ou de courtes durées-  et proposent  de développer la multi activité, parfois avec des formes juridiques adaptées.

Depuis 2014, les différents Ministres du Travail, le 1er Ministre M. Valls et même le Président F. Hollande ont souligné l’importance des formes innovantes d’emplois comme le portage salarial ; ce dernier propose en effet d’associer la liberté de l’indépendant avec le statut de salarié, ce qui implique l’ouverture de droits à  l’assurance chômage, à la retraite et l’accès à une protection Santé.  La formule semble correspondre à bon nombre de travailleur en multi activité.workplace-1245776_640-pixabay-CC

8 exemples de Shlasheurs qui développent la synergie professionnelle

La presse s’empare régulièrement du sujet des indépendants afin de montrer les nouvelles formes d’emplois en multi activité. Au delà des activités classiques freelance déjà connues (rédaction, pige, infographie, métiers créatifs, développeur), il est intéressant de noter l’apparition de combinaisons nouvelles.

Elles montrent comment en associant des activités, le shlasheur développe une multi compétence qui le rend difficilement interchangeable et lui apporte une nouvelle valeur ajoutée sur chacune de ses activités. Cette valeur ajoutée peut être une garantie de revenus et représente aussi une source d’épanouissement. Voici des exemples de shlasheurs vus dans la presse et les articles de blog :

  • Laeila : « Concepteur-rédacteur » dans la publicité » / « Journaliste-pigiste » / « Professeur de massage thaïlandais », (3)
  • Anaïs : « Vendeuse à mi-temps aux Galeries Lafayette »/ « Journaliste-pigiste »/ « Mannequin grande taille »/ « Membre d’un projet e-commerce de produits vintages » (4)
  • Lyvia (ancienne consultante en gestion d’entreprise) :  « Bloggueuse »/ « Coach des ateliers Jemecasse.fr » / « Passions peinture, cuisine… » (5)
  • Marjolaine (6) : « Rédactrice web » / « Scénariste BD » / « Chasseur de tête »
  • Rodolphe : « Ingénieur aéronautique »/ « Entrepreneur » / « Coach » / « Passionné de philosophie » (6)
  • Frédéric : « Directeur financier » / « Coach en décoration d’intérieur ». (7)
  • Mélanie Heurtaux : « DRH » / « Responsable d’association pour l’entretien des espaces verts ». (8)
  • Guilhem Julia : «  Maître de conférences en droit » / « Magicien » (8)

 

Les 3 règles de la réussite des Shlasheurs

Même si les slasheurs sont au départ plutôt jeunes 20-35 ans et issus du monde d’internet, leur profil évoluent  Aujourd’hui, ceux qui réussissent à trouver leur équilibre peuvent venir de populations plus «seniors» qui malheureusement vivent un licenciement, une reconversion professionnelle ou veulent « changer de vie ». Trois grandes règles ressortent des parcours de shlasheurs :

  1. Le slasheur est curieux de tout, il se forme en permanence :
    En effet, le slasheur par principe doit faire évoluer son travail, trouver de nouvelles sources de revenus et d’épanouissement. Il sait que 75% des métiers de 2025 n’existent pas encore. Il est conscient de l’obsolescence des compétences mais aussi de la facilité d’apprentissage (MOOC, webinaire). Il s’informe et se forme régulièrement, poussé par sa motivation ou sa passion. Il explore ce qui est à la limite de son savoir pour en repousser les bornes et s’ouvrir de nouvelles opportunités.
  2. Le slasheur  développe une forte logique de synergies entre ses métiers :
    Quelque soit son métier d’origine ou sa passion, le slasheur fait évoluer ses compétence de façon cohérente par rapport à sa logique interne. Ainsi, il parvient à établir des passerelles naturelles entre ses différentes activités qui n’étaient pas imaginables au départ. Chaque activité s’enrichit mutuellement et débouche sur une amélioration générale du savoir-faire (source potentielle de revenus) et un accomplissement personnel. Sa multi-activité se développe en toute logique.
  3. Le slasheur  travaille ses  réseaux et son agilité :
    Le slasheur n’est pas solitaire. Il travaille en réseau ce qui lui procure des opportunités d’activités, une vie sociale riche et favorise les échanges de compétences. Un slasheur au profil désorganisé aura intérêt a suivre les conseils d’un coach d’entreprise qui pourra à son tour apprécier les conseils pour développer sa créativité. La slasheur est collaboratif : avec ses clients ou ses pairs, son approche des projets est toujours généreuse. Il peut rapidement former une équipe pour répondre à une demande. Il joue de son agilité professionnelle.

 

Sources :

(1) « Etude A Vision for the Economy of 2040 » 07/07/2015, Institut Roosevelt et Fondation Kauffman.
(2) Sur 10 ans,  le nombre de déclarations d’embauche en CDD a progressé de 76 % (4% pour le  CDI) et la durée des CDD de courte durée progresse (durée moyenne : 1,7 semaine et 21 % des déclarations en CDD sont pour des durées de plus de 1 mois).
(3)   « Génération Slash : ces trentenaires qui cumulent les métiers « , Francesca Serra, Grazia
(4)  « Génération Slash : ces trentenaires qui cumulent les métiers « , Francesca Serra, Grazia
(5) « Slasheurs : ils cumulent les emplois », Katrin Acou-Bouaziz , www.psychologies.com
(6) « La révolution des slasheurs : comment ils bouleversent le rapport au travail » 01/06/2016, Grégory Herbé, CEO de MyJobCompany.
(7) « Ils sont slasheurs en attendant de changer de vie », Cadremploi, Jeanne Ably
(8) « Ces slasheurs cumulent un job passion et un job raison », 05/07/2016, Cadremploi, Jeanne Ably

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